Bonjour,
j'ai 46 ans, je suis mariée depuis 25 ans, j'ai 3 enfants. La vie n'a pas toujours été facile avec mon mari, mais en dépit des épreuves, je n'ai jamais songé à le quitter. Pour moi, quand on aime une fois on aime pour toujours, et je n'abandonne personne. Voilà le genre de certitudes qui sont au fondement de ma relation aux autres, sans y mettre aucun moralisme. Je suis juste incapable de me détacher. Il y a 17 ans, j'ai appris que mon mari avait des liaisons homosexuelles. Il me les avait cacheées, afin de ne pas me perdre. Je les ai acceptées, afin de ne pas le perdre. J'étais choquée, en proie à une peur terrible de l'abandon mais je le trouvais courageux et je ne m'accordais pas le droit de restreindre sa liberté. De son côté, il a toujours été très rassurant et aimant. Son histoire avec son ami s'est terminée au bout de quelques mois, nous évitions d'en parler. Nous avons eu nos enfants qui ont rempli nos vies, même si nous avions souvent l'impression de beaucoup subir. De mon côté, je détestais le modèle de la famille traditionnelle dans lequel j'étouffais. Je détestais nous voir dans la file d'attente des péages avec les enfants qui pleurent à l'arrière, et nous, au bord de la crise de nerfs. Mon mari était étouffant, asphyxiant, râleur, aigri, extrêmement dépendant de moi, il me faisait subir une sexualité très angoissée et dominatrice, qui ne prenait pas en compte mes désirs -ou plutôt mon absence de désir. Moi, fataliste, je me disais que ce n'était pas pour moi. Je vivais dans une tension permanente, à cause de lui, du travail, des enfants... ll y a 3 ans, mon meilleur ami, qui m'a manqué toute ma vie, a repris contact avec moi, par mails. C'était extraordinaire, merveilleux, un miracle, car j'avais fait un deuil très douloureux de notre relation (amicale quand nous avions 19 ans). J'ai accepté que s'il m'avait "abandonnée" il y 25 ans, c'est parce qu'il m'aimait et avait perdu tout espoir de faire évoluer notre relation. Il est vrai qu'à l'époque, je le voyais comme un frère, asexué, mon alter ego. Nous avons échangé un grand nombre de lettres, de plus en plus intenses, de plus en plus intimes. Je ne pouvais plus me cacher mon amour pour lui. Il vit à l'étranger, il est marié, il a 4 enfants. Il n'était pas heureux avec sa femme. Nous sommes tombés amoureux. J'ai découvert le désir. Il est venu dans ma ville. Jusqu'alors, je mentais à mon mari. Quand mon ami est devenu mon amant, j'ai tout avoué. La réaction de mon mari a été à la hauteur de sa souffrance : des cris, des menaces, du chantage affectif, des jugements (la crise de la quarantaine blablabla), de l'infantilisation, il m'a interdit d'écrire à mon ami, il a brandi le suicide, les enfants... c'était affreux. J'ai vécu cela comme un traumatisme et une grande injustice. Pendant des mois j'ai continué à écrire à mon ami, en secret. J'ai essayé d'orienter notre relation vers l'amitié, et mon ami m'a suivie, mais c'était nous mentir à nous-mêmes. Je dépérissais à vue d'oeil, humiliée, opprimée. De son côté, mon ami subissait la jalousie de sa femme, avec qui il était resté pourtant très tendre, rassurant et attentif. C'est devenu si difficile qu'ils ont décidé d'une "semi-séparation", qui a porté ses fruits : ils se sont rendu compte de ce qui les liait. Je n'ai aucun problème avec ça, je trouve cela même beau et noble. Comme mon ami est venu vivre en France, nous avons passé 2 week-end ensemble. En secret. C'était affreux de me sentir si vile, si indigne. Finalement, j'ai tout avoué à mon mari et je lui ai demandé la séparation. Lui était toujours en grande souffrance, au bord du suicide. Cependant il a réagi avec une grande intelligence. Il s'est bien entouré (il n'avait aucun ami, aucune famille, aucun collègue : j'étais TOUT pour lui), il a commencé le yoga, la méditation, la thérapie, le sport etc. Et il m'a proposé l'amour libre. C'était il y a 3 mois. Pour moi, ça a été un immense soulagement : de la transparence, du respect... Depuis, j'ai passé un week-end avec mon ami. Mon mari a bien "géré", même si c'était difficile. J'admire le chemin qu'il a fait, lui qui était possessif, jaloux, intrusif, dans le contrôle absolu. Le problème, à présent, c'est moi. Je n'arrive pas à renouer physiquement avec mon mari. Son désir me stresse énormément. J'ai peur de le manipuler (alors qu'il n'attend que ça), de subir encore une situation que j'ai trop subi (sa sexualité très prédatrice), de "tromper" mon ami (qui a pourtant toujours des relations amoureuses et intimes avec sa femme), mon ami me manque constamment, j'ai l'impression de rester avec mon mari pour de mauvaises raisons, et pourtant il est formidable, je lui suis reconnaissante pour tout ce qu'on a vécu ensemble et pour son très grand, très beau courage, pour son amour inconditionnel. J'aimerais qu'il s'ouvre de son côté (pour qu'il me laisse respirer, pour ne plus faire "couple") mais il s'y refuse. Il affirme que ses liaisons avec des hommes étaient une "crise", que ça lui a passé. Il m'a toujours fait croire que c'est lui qui avait quitté son amant par amour pour moi, parce que je souffrais. En y repensant, cela ne me semblait pas cohérent, et il m'a avoué -mais pour cela j'ai dû le pousser dans ses retranchements- il y a quelques jours que c'est son ami qui l'avait quitté. Pour moi, cela change tout. Mon mari a fait peser sur moi une version qui était fausse, alimentant ma culpabilité et ma reconnaissance. Il m'a toujours affirmé que je me faisais des idées, tout était retourné en sa faveur. Voilà, c'est toujours une question d'emprise, et je n'en peux plus. De son côté, mon ami me considère comme "la femme de sa vie", ce qui me gêne aussi. Je préfère être la numéro 2, la femme d'à côté, un peu en retrait, car cela me laisse de l'espace. Je veux être libre, c'est tout. La femme de mon ami lui demande de choisir. Je crois qu'il préfèrerait ne pas choisir, mais elle souffre, et il tient compte de sa souffrance. Elle préfère briser leur mariage et leur famille plutôt que de m'accepter dans sa vie. J'ai beaucoup de mal à comprendre mais bon... Quoi qu'il en soit, mon ami rêve qu'on soit ensemble, vraiment. Il évite de me mettre la pression, mais il ne peut pas toujours le taire. Bref, j'ai l'impression que le polyamour est une solution bâtarde qui ne convient qu'à moi, parce que je suis incapable de supporter la souffrance de mon mari, incapable de trancher, parce que j'ai peur, parce que j'ai 3 enfants, parce que je suis profondément attachée à mon mari qui a fait un beau chemin..Je me sens indigne. J'aimerais que mon mari rencontre quelqu'un et me laisse, mais il ne le fera pas, car son amour est contrôlant. Ce qui est fou c'est que tout le monde me laisse libre, et que malgré tout, je me sens enchaînée comme jamais. Dernière précision : je n'avais jamais trompé mon mari, en revanche j'ai aimé 3 autres personnes pendant mon mariage (des femmes), et cela ne me posait AUCUN problème, du moins, pas de cet ordre-là. Désolée pour le pavé, c'est un sacré sac de noeuds dans ma tête ! Je voudrais que tout le monde aille bien...