CONDITIONNEMENTS SEXISTES | Femme parfaite et patriarcat (Encyclopédie de la Femme 1950)

Découvrez l’origine des conditionnements sexistes à travers l’Encyclopédie de la Femme (1950) : l’idéal de la femme parfaite façonnée par le patriarcat. La « maitresse de maison » doit être parfaite, discrète et dévouer sa vie au ménage, au « chef de famille » et aux enfants. D’ailleurs à cette époque : « La vie conjugale : c’est le début de l’existence de la femme ». 🤦‍♂️


UNE AUTRE EPOQUE

Cette encyclopédie détaille avec une extrême précision absolument tout ce qui concerne la femme et le ménage (sous-entendu la vie de famille). L’organisation d’un placard, des recettes de cuisine, comment se maquiller, s’habiller, coudre, tricoter, repasser, balayer, la disposition des meubles, l’organisation de la cuisine, l’éducation des enfants… Bref, c’est ultra complet !

Au début je trouvais ça étonnant d’en faire une encyclopédie et que tout soit autant normalisé mais il ne faut pas non plus oublier qu’à l’époque y’avait pas Google. Donc avoir sous la main un livre qui permet de savoir comment enlever la tâche de vin sur le canapé ou comprendre les symptômes de son bébé, c’est quand même fort utile ! En fait ce livre c’est un mélange d’informations intéressantes, encore pertinentes aujourd’hui, et d’aberrations sexistes incroyables dont je vais vous donner pas mal d’exemples !

Je précise que ce livre représente la culture et l’éducation catholique. A cet époque l’homosexualité est considéré comme une maladie et il n’y a que deux genres : l’homme et la femme. Mais peu importe votre orientation et à quel genre vous appartenez ou vous vous identifier, à un moment donné dans votre vie, vous avez probablement était catégorisé en tant qu’homme ou femme hétéro. Peut-être que vous allez reconnaître certains ancrages de votre éducation qui persiste encore aujourd’hui ou que vous avez au contraire absolument évités.

Pour vous remettre dans le contexte en 1950, la femme avait le droit de voter depuis quelques années, l’avortement était illégal et puni d’une amende avec emprisonnement, le mariage était une nécessité et le divorce était compliqué puisqu’il n’était pas reconnu par la religion.

En fait sur le papier la femme avait les mêmes droits que l’homme mais en pratique elle était beaucoup trop conditionnée dans son rôle pour que ça puisse faire une différence. Je vais vous l’illustrer tout de suite : « Depuis 1945, les femmes votent en France. Elles occupent des situations de premier plan dans le commerce, l’industrie, la banque et toutes les professions libérales : elles ont accès à tous les postes de commande. Désormais, la femme française est l’égale de l’homme. Mais cette femme, habituée, maintenant, à vivre seule, sent parfois le besoin d’éclairer sa solitude. La nature, qui reste toujours la plus forte, l’incite à chercher le compagnon auquel elle continue à rêver. » (Page 223).

ROLE DE LA FEMME

Donc à cette époque, chacun à un rôle spécifique déterminé par son genre et non par ses aptitudes ou ses envies. On commence par la femme. C’est « la maitresse de maison » ! Mais avant d’arrivé à ce grade prestigieux, c’est d’abord une jeune fille qui considère que « seule, la vie au foyer, avec un mari et des enfants, est complète. La jeune fille, chez nous, pense que son travail, pour aussi intéressant qu’il soit, est seulement d’attente. Elle désire se marier. Elle est coquette et cherche toujours à plaire. Dans de telles conditions, elle trouve presque toujours l’homme dont elle espère faire son mari. » (Page 223). Donc travailler c’est juste un passe-temps utile en attendant de trouver un homme. Bien sûr elle peut occuper n’importe quel poste mais « ses parents la verront d’un œil favorable offrir sa collaboration à des Sociétés de Bienfaisance ou de Secours aux Aveugles, aux Mutilés, à l’Enfance Malheureuse ou se charger de la garde d’un enfant, ou encore occuper un poste de secrétaire. » (Page 251).

Pour reprendre la citation en intro, dont je vous lirai la suite en fin de vidéo : « La vie conjugale. C’est là que commence l’existence de la femme ». Pour moi cette seule idée peut être à l’origine des peurs liés à la dépendance affective. Vous allez me dire « oui mais on n’est plus en 1950, on n’a pas été éduqué comme ça ». Et pourtant si vous êtes plus ou moins de ma génération (des années 80), ces conditionnements étaient encore très présents. Il suffit de regarder les Disney ! Je n’ai rien contre ces dessins animés qui font partie de mon enfance mais malheureusement ils reflètent les mentalités de l’époque. Cendrillon, La belle au bois dormant, Blanche neige, Aladin, La Petite Sirène et d’autres ; mettent en avant des personnages féminins, présentés comme incomplètes ou malheureuses, qui sont dans l’attente qu’un prince charmant vienne les sauver ou donner un sens à leur existence.

Toutes leurs attentes dépendent de ce prince, c’est même parfois une question de vie ou de mort. Et une fois en relation, la situation n’est pas moins angoissante puisque s’il disparaît c’est retour à la case départ, ce qui potentiellement peut alimenter la peur de l’abandon. D’où l’importance capitale pour la femme de se battre pour le garder ! Et vous allez voir qu’il est très clairement écrit dans ce livre, qu’elle est entièrement responsable de la bonne entente du couple à un degré que vous n’imaginez même pas. Voilà un petit extrait et je garde le reste pour la fin de cette vidéo : « Il faut que la femme soit consciente des difficultés qui vont surgir pour elle. Il est indispensable qu’elle abandonne tout ressentiment et qu’elle cherche en elle-même des excuses à son mari. » et un peu plus loin « Tout vaux mieux que la séparation, surtout lorsqu’il existe des enfants. » (Page 225).

En parlant d’enfant, la maternité est considérée comme « l’état normal de la femme entre 20 et 40 ans » (Page 185) car « la femme est faite pour transmettre la vie ». Donc une fois qu’elle a trouvé un mari, son rôle est de faire des enfants, les éduqués et entretenir la maison. Au passage « le lavage de la vaisselle est peut-être la besogne la plus ingrate qui incombe à la ménagère. Chacune est en droit de penser que si elle avait pu imaginer, la veille de son mariage, la montagne d’assiettes qu’elle aurait à laver au cours de son existence, elle aurait peut-être reculé devant une telle tâche ! » (Page 79). La cuisine est « le fief de la maitresse de maison », mais les occupations de la ménagère sont bien plus nombreuses : faire à manger, la vaisselle, laver et repasser le linge, passer l’aspirateur, faire la poussière, tricoter, etc. Donc en gros quand Cendrillon rencontre son prince, soit il est assez riche et elle peut déléguer ses tâches à des domestiques, soit elle retourne cirer le sol mais en plus elle doit gérer les enfants… Ça fait rêver ! Petit clin d’œil aussi à Blanche Neige qui se retrouve quand même perdu au milieu de la forêt à s’occuper de la maison et faire des tartes pour 7 nains affamés qui travaillent toute la journée !

Ça illustre bien cette phrase du livre qui explique que le rôle de la femme est tout simplement « d’assurer le bonheur des êtres qui les entourent ». Et on verra un peu plus tard, qu’elle va devoir tout sacrifier pour y arriver.

ROLE DE L’HOMME

Le rôle de l’homme est complétement différent. Sa femme doit entretenir la maison correctement pour permettre « au chef de famille le délassement après la journée de labeur » (Page 73). Voilà ! Il n’y a pas grand-chose à dire de plus, le rôle de l’homme est de travailler, rapporter de l’argent, prendre les décisions importantes et tout le reste (la maison, l’organisation, l’éducation des enfants) c’est la femme ! Le livre les incite quand même à participer mais ce n’est pas super important, c’est-à-dire que passer l’éponge sur la table de temps en temps c’est déjà très bien !

La gestion des comptes reflète très bien la différence hiérarchique entre le rôle de la femme et de l’homme : « Le budget du ménage sera établi avec soin ; les comptes seront tenus par la femme qui fera ses efforts pour en rester administratrice (Sous-entendu elle nulle en math et elle va faire n’importe quoi). Il est désagréable que ce soit l’homme qui se préoccupe des économies du ménage. Mieux vaut qu’il en ait la direction générale. Celle des petits comptes et des achats journaliers devant rester à la femme. » (Page 224).

Pour aller encore plus loin, si le couple se marie en « communauté légale » et que la femme ne rédige pas un contrat spécifique, l’homme « peut faire seul, sans aucun contrôle, tout ce qui lui plaît » (Page 234), comme la vente ou la donation de meuble ou d’immeuble. Même la gestion des biens de la femme peut « être accomplis que par la femme, autorisée de son mari. Mais c’est le mari qui administre ces biens. » (Page 234).

Donc c’est une société clairement patriarcale et on pourrait penser que ce n’est plus le cas depuis le temps. Mais les droits et les possibilités des femmes évoluent plus vite que les mœurs. Ce n’est pas parce qu’elles ont le droit d’accéder aux mêmes postes que les hommes qu’elles auront autant de facilité pour le faire. Ce n’est pas une question de capacité, c’est culturel. Certaines personnes, hommes ou femmes d’ailleurs, avec des idées dépassées font des distinctions entre les genres. Pour un post technique ou de leadership, à CV équivalent, un profil masculin pourrait avoir l’avantage. C’est un cliché très présent dans ce livre : « Le bureau à l’usage de madame : vous avez besoin de faire les comptes de la journée (ou la couture ça marche aussi). Le bureau à l’usage de Monsieur : ou bien Monsieur veut étudier la fabrication d’un nouveau condensateur pour sa voiture, et il lui faudra étaler devant lui toute la documentation voulue ! » (Page 84).

Les femmes peuvent également être discriminés par rapport à un éventuel congé maternité. Donc le livre à peut-être plus de 70 ans mais beaucoup d’inégalités restent d’actualité car les mœurs évoluent lentement !

ATTITUDE DE LA FEMME

Pour remplir son rôle de femme, la maitresse de maison devait adopter certaines attitudes. Sa première qualité, et ça vous parlera peut-être, c’est de toujours rechercher la perfection à tous les niveaux ! Les mots « parfaite » et « perfection » sont employés partout dans ce livre, c’est hallucinant ! Et ça commence dès le premier chapitre sur « La femme et la beauté », dès qu’on tourne cette page, on tombe sur la « table des proportions parfaites de la femme ». C’est incroyable ! Je vous laisse mettre pause et vérifier s’il vous plaît que vous rentriez bien dans ces critères… apparemment c’est très important ! Quand je vois ça, j’ai l’impression que la femme est présentée comme un produit avec des caractéristiques techniques. Mais ça existe toujours, par exemple dans les concours de beautés, je ne comprends pas qu’il y ait des critères de participation sur la taille, le poids ou les mensurations ! Et l’image de cette femme parfaite est également très présente sur les réseaux sociaux et dans les médias.

A cet époque, l’apparence d’une femme était vraiment super importante, je vous cite un passage : « La beauté, ou, plus exactement, la meilleure utilisation des dons naturels que chaque femme a reçus à sa naissance, est à la fois une nécessité et un devoir (Vous imaginez que la beauté est une nécessité et un devoir, vous devez être belle !). Nécessité pour celles qui travaillent et doivent conserver, le plus longtemps possible, leur activité, de défendre une jeunesse fragile, de garder un visage avenant. (Sous-entendu, si tu perds ta beauté, tu perds ton boulot). Devoir, pour celles qui demeurent au foyer et dont la tâche est d’assurer le bonheur des êtres qui les entourent, pour celles qui se penchent sur un berceau, d’incarner la plus belle image de la femme dans son rôle le plus noble. Il n’y a là rien d’impossible ; ce n’est même pas difficile. La laideur réelle est aussi rare que la beauté parfaite. En dehors de certaines monstruosités qui relèvent du domaine médical et de la chirurgie, la laideur n’existe pas. Il n’y a que des femmes ignorantes ou maladroites. La chirurgie esthétique supprime les monstres. » (Page 9).

Moi personnellement, qu’une femme soit maquillée ou pas, je m’en fou complétement ! Mais ma copine qui se maquille très peu, me demande encore parfois si je suis sûr que ça ne me dérange pas. Et je ne comprenais pas d’où venait cette peur avant que je lise ce passage : « celles qui ne voudront pas infliger à leur mari le voisinage d’une femme impossible à embrasser, et le spectacle d’oreillers et de draps maculés, devront s’enduire de crème nourrissante le matin » (Page 15). Cette volonté de faire très attention à son apparence est resté alors que pour les hommes avoir l’air négligé c’est presque une mode !

D’ailleurs le maquillage peut « transformer une femme et l’embellir au point de la rendre méconnaissable » (Page 19). Eh oui ! Si votre apparence ne correspond pas aux normes sociales, il va falloir passer quelques heures tous les jours devant le miroir sinon votre vie est foutue ! La preuve : « Rien n’est plus désagréable pour une femme que de vieillir. En France, pays latin, la femme jeune et jolie joue un rôle primordial. (Sous-entendu la vaisselle elle ne va pas se laver toute seule). Les hommes la regardent, l’entourent et sont ses serviteurs. La femme qui vieillit perd tout son prestige et sent cruellement cette indifférence à son égard. Le plus redoutable, c’est qu’elle se laisse aller au pessimisme, à l’amertume. Elle devient alors une vieille dame indésirable, querelleuse et méchante dont tous les jeunes s’éloignent. » (Page 226).

On comprend mieux le succès des crèmes anti-rides ! D’ailleurs c’est l’histoire de Blanche Neige où la reine qui vieillie, perd de sa beauté et donc de sa valeur. Et quand on s’identifie à son physique, on se sent en danger face à quelqu’un de plus jeune et de plus jolie, on a peur et on devient jaloux. Donc ces concepts là nous conditionnent depuis notre enfance.

Du coup l’apparence devient un tel enjeu que les femmes vont jusqu’à se flageller pour rester jeune, je cite : « plier une serviette de toilette en trois dans le sens de la longueur ; la tremper dans l’eau froide et flageller le dessous du menton en tirant sur chaque extrémité de la serviette, 40 fois. » (Page 23). Ça a l’air hyper fun ! Et chaque minuscule imperfection fait l’objet d’un paragraphe entier sur comment s’en débarrasser ou l’atténuer.

En parlant d’esthétique je vais aborder un sujet sensible : l’épilation des aisselles. Dans le livre, c’est vite réglé : « l’épilation des aisselles s’impose à toutes les femmes. » (Page 35). Aujourd’hui certaines femmes arrêtent de s’épiler et c’est devenu controversé. Beaucoup d’entre vous ne souhaitent pas exposer leurs aisselles ou leurs jambes si ce n’est pas un minimum épilé. C’est le cas de ma copine qui portera un jeans pour cacher ses poils même s’il fait 40 degrés ! On est d’accord que l’épilation n’est pas nécessaire pour votre santé, c’est purement esthétique ce qui est un critère absolument subjectif ! Pourquoi c’est ok pour les hommes ? Alors oui, on a une pilosité plus développée, mais je pense que si on était épilé ça serait plus agréable pour vous aussi ? J’avoue que je préfère une femme épilée mais je suis conscient que c’est un conditionnement et que si ça n’existait pas, je n’y penserai probablement pas. Quand je parle de ça à certaines femmes, c’est leur limite. Elles me disent « ok je suis féministe mais là non, on ne va pas se laisser pousser des poils sous les bras quand même, c’est horrible ! ». Mais je pense que ces comportements, comme beaucoup d’autres, sont automatiques car tout le monde le fait. Donc la plus grande barrière à l’évolution des mœurs c’est d’abord la peur de se montrer différent et de se faire remarquer.

Le plus dingue dans la recherche de la perfection physique c’est que les personnes qui vous pondent une table des mensurations parfaites sont les mêmes qui font ensuite culpabiliser les femmes que ça devienne une obsession, écoutez ça : « Beaucoup de femmes comparent leur poids et leurs mensurations à ceux qui sont indiqués par des tableaux comme celui-ci qui a été établi d’après un type régulier destiné à servir de base. Elles se préoccupent avec exagération de 2 ou 3 cm de tour de hanches en plus, de 4 ou 5 kg de trop, ou de 2 cm de tour de poitrine en moins, et cela aboutit parfois à une véritable obsession. » (Page 32).

La femme est également décrite comme un être dont sa nature est de séduire et de plaire : « le rôle d’une femme élégante est sensiblement différent et qu’elle doit (ou qu’elle désire !) se faire remarquer, du moins plaire et être remarquée… par son élégance, son chic, sa distinction. » (Page 49). Ce genre de remarque il y en a partout dans le livre.

Mais la recherche de la perfection ne s’arrête pas au physique. La femme doit être parfaite et exemplaire dans tous les domaines : la mode, la cuisine, le rangement, l’organisation, le ménage, la santé ou même en tant qu’épouse. L’un des nombreux problèmes avec cette éducation de la perfection est qu’elles développent une aversion au risque. Car comme il faut être parfaite, elles prennent moins le risque de s’engager dans quelque chose si elles ne sont pas persuadées de réussir.

C’est le cas de ma copine, qui à la fin de l’université avait préparé un dossier pour faire des études supérieures et ne l’avait pas envoyé car elle pensait qu’il était médiocre. Il était prêt, timbré dans l’enveloppe avec l’adresse, elle avait juste à le poser dans la boîte aux lettres, elle n’avait rien à perdre ! Evidemment je l’ai poussé à l’envoyer et elle a été admise.

Ça rejoint les recherches de Reshma Saujani qui partagent ses idées dans une conférence TED en lien ci-dessous, avec comme titre « Enseignez aux filles le courage et non la perfection ». Elle explique par exemple, qu’un homme postule pour un boulot quand il répond à en moyenne 60% des critères de sélection. La femme le fait quand elle répond à 100% de ces critères ! Elle a également fondé une école de programmation et a observé des différences comportementales. Les garçons ont tendance à demander de l’aide et montrer leur programme pour comprendre « ce qu’il ne va pas dans leur code ». Alors que les filles ont parfois plus de mal à solliciter de l’aide et quand elles le font, elles disent plutôt « il y a quelque chose qui ne va pas chez moi, je n’y arrive pas ». Elles présentent souvent un écran vierge au professeur qui doit revenir en arrière dans les actions pour découvrir leurs programmes. Elles préfèrent ne rien montrer que présenter quelque chose d’imparfait. C’est parfait, ou ce n’est rien !

Cette recherche de la perfection, ce n’est même pas le pire, le plus choquant arrive tout de suite ! Une femme doit être jolie, bien apprêté, agréable à regarder, discrète et silencieuse, donc en gros une plante verte ! Mais ce n’est pas tout, elle doit aussi être généreuse, altruiste, dévoué et ne pas se plaindre ! Le mieux c’est de vous lire quelques passages qui se passeront de commentaires et je vous garde le pire pour la fin de cette vidéo !

La jeune fille dans sa famille : « Il peut sembler inutile, en parlant de la jeune fille, d’évoquer le charme qui doit se dégager d’elle et les qualités qu’elle s’efforcera de développer pour devenir l’être gracieux, agréable que son nom seul évoque. Nous nous bornerons ici à lui indiquer le comportement idéal qu’elle devra rechercher, tant à l’égard de sa famille que de ses amis, et d’elle-même. Respect à l’égard de ses ascendants, bonne humeur vis-à-vis de ses parents, de ses frères et sœurs. C’est en faisant l’effort sur elle-même avec la volonté de réussir, qu’elle obtiendra une amélioration du statut familial. Que notre jeune fille n’oublie jamais que tout s’arrange avec un sourire et que les complications de famille les plus graves ne résistent pas à la volonté de bien faire, d’apaiser les querelles. Elle ne devra jamais se laisser entrainer à prendre violemment parti dans quelque conflit que ce soit. Il faudra que la jeune fille se préoccupe de tout ce qui concerne la maison, la tenue du foyer, la cuisine. Tous les éléments qui font une bonne maîtresse de maison doivent lui être familiers. » (Page 221).

La jeune fille dans son travail : « La jeune fille au travail développera ses qualités d’ordre, de régularité. Elle s’habituera peu à peu à une discipline indispensable. Elle cherchera à être toujours exacte, correcte dans sa tenue et son maintien. Elle évitera, pour flatter un collègue, de prendre parti. Elle sera discrète et silencieuse. Son travail y gagnera et aussi sa réputation vis-à-vis des autres employés. Le premier devoir qu’elle ait à accomplir, c’est de bien faire sa tâche, sans se préoccuper de ses relations avec ceux qui l’entourent. Elle s’emploiera à observer un certain respect vis-à-vis de son employeur. Les relations avec le patron devront toujours rester sur le plan de la déférence. Les relations avec ses collègues devront être mesurées, l’intimité avec l’un ou l’autre ne doit jamais se manifester durant les heures de travail. Que notre jeune fille se souvienne que la porte de son bureau ou de son atelier franchi, elle est l’employée du patron qui la paye pour que sa tâche soit assurée. Pas de conversations inutiles, pas de bruit, le silence est de rigueur ». (Page 222). On remarquera la petite illustration avec la machine à écrire !

L’éducation des filles : « Elle doit se faire dans le sens le plus altruiste. Le rôle de la femme dans la vie est de tout donner autour d’elle, confort, joie, beauté, tout en gardant le sourire, sans faire figure de martyre, sans mauvaises humeur, sans fatigue apparente. C’est une lourde tâche ; il faut entraîner notre fille à ce renoncement perpétuel et heureux. Dès la première année, elle doit savoir spontanément partager ses jouets, ses bonbons et donner ce qu’elle a autour d’elle, surtout ce à quoi elle tient le plus. » (Page 209).

Maintenant je comprends mieux pourquoi certaines femmes se mettent autant la pression. Vous verrez également dans les derniers extraits que la femme a le devoir d’être dévoué à son mari, de faire preuve d’abnégation (donc de sacrifier ses propres intérêts), d’accepter ces défauts et de le changer en un homme meilleur. Et ça c’est un classique du cinéma et de la littérature. Les femmes sont conditionnées à se comporter comme ça.

Le meilleur exemple c’est « La belle et la bête ». Je crois que le titre lui-même est suffisant. La « belle » qui incarne la beauté, la perfection, et la « bête » à l’aspect sauvage avec un mauvais caractère. Elle va faire des sacrifices énormes, contre son gré au début, pour accepter ses défauts et le changer jusqu’à le transformer en un vrai prince charmant. Donc en gros, peu importe les défauts de l’homme que vous allez rencontrer, c’est à la femme d’être parfaite, exemplaire, patiente et de le transformer pour qu’il corresponde à ses attentes. Bien sûr dit comme ça, ce n’est pas sexy, ce n’est pas vendeur. On va alors envelopper tout ça de romantisme pour que ce soit vécu et perçu comme quelque chose de beau et de romanesque.

D’ailleurs c’est un peu le même combat pour Ariel de « La petite sirène ». A la rencontre de son prince, elle abandonne sa voix, ses amis et sa famille pour partir le séduire en sachant que si elle échoue elle sera faite esclave jusqu’à la fin de sa vie !

ATTITUDE DE L’HOMME

Pour remplir son rôle d’homme, le chef de famille devait adopter des attitudes complétement différentes. Il est déjà présenté comme « naturellement plus égoïste que la femme. Elle ne doit pas s’en formaliser et chercher au contraire à déployer ses qualités de dévouement et d’altruisme » (Page 224).

Donc peu importe ses comportements et ses défauts, elle doit faire avec et le faire changer si elle ne le supporte plus. Contrairement à la femme, il ne cherche pas à séduire ou à plaire, et portent des vêtements « qui doivent, avant tout, passer inaperçus » (Page 209).

Concernant l’éducation des garçons, je ne sais pas si vous vous souvenez de tout ce qu’on demandait aux filles mais pour eux c’est nettement plus cool : « l’attitude de la maman envers ses garçons ne diffère pas sensiblement de celle qu’elle a envers ses filles. SI elle ne peut leur demander de participer autant aux soins du ménage, il est nécessaire toutefois qu’elle leur demande de prendre part à l’ensemble de la besogne familiale pour que la charge répartie sur la mère et les filles ne soit pas trop écrasante et pour qu’ils aient le sentiment de faire intimement partie de cet ensemble parfait qu’est la famille. » (Page 210).

Les hommes ne sont pas non plus présentés comme très sociales. J’ai trouvé un passage sur les visites officielles et obligatoires : « Pour nos maris, elles sont une des corvées de l’existence, mais c’est à nous d’user de beaucoup de patience et de persuasion dans ce cas, en leur montrant qu’elles sont nécessaires pour entretenir une relation ou une amitié » (Page 252).

Voilà le peu d’information que j’ai sur les hommes dans cette encyclopédie surtout basé sur la femme. La plus grande différence est que les hommes sont acceptés tels qu’ils sont, avec leurs défauts et ne sont pas limités dans leurs possibilités. Et j’en reviens à la vidéo dont je vous ai parlé toute à l’heure qui explique justement que les garçons sont éduqués à être courageux, à ne pas avoir peur d’échouer et à accepter l’imperfection.

MONOGAMIE ET MARIAGE

Ce qui est sûr, c’est qu’à cet époque la monogamie et le mariage étaient incontournable. C’était presque impossible pour une femme, socialement ou financièrement, de vivre seule ou en union libre comme le démontre ce passage : « ce qu’il faut surtout savoir éviter, c’est l’aventure romanesque qui ne mène à rien, déçoit et entrave la vie. De mauvais bergers prétendent que l’union libre est, à notre époque, tout à fait admise. Ils trompent la jeunesse et la mènent à travers des chemins bien difficiles ! Aucune garantie n’est donnée à la Femme, hors le mariage. La Loi elle-même ne peut consacrer ces unions qui n’apportent qu’amertume, désillusions et désespoir. Depuis les temps les plus reculés, le mariage est seul admis. Il y a des raisons primordiales pour cela. Le progrès n’a jamais consisté, de nos jours, à permettre l’Union libre. Les lois ne la reconnaissent point. C’est pourquoi nous ne saurions assez recommander aux jeunes filles de faire très attention et de ne pas compromettre leur avenir dans des aventures qui se révèlent toujours désastreuses ! » (Page 222).

Mais pour l’époque ce n’est pas un mauvais conseil en fait car les femmes avaient besoin de se marier pour assurer leurs stabilités. C’était également un prérequis pour avoir des enfants.

Si la monogamie et le mariage sont si compliqué à remettre en question de nos jours pour certaines personnes c’est que tous ces ancrages sont encore très présents. Il y a beaucoup de chose à dire là-dessus mais ça sera le sujet d’une autre vidéo, en attendant je vous invite à regarder le reportage de « En bref » sur Netflix à propos de l’histoire de la monogamie. Je vous mets en lien la version YouTube.

Maintenant on finit par le top 3 des pires choses que j’ai pu lire dans ce pavé de 300 pages !

LE PIRE DU PIRE N°3

« La rupture du lien conjugal. Le ménage n’est pas heureux. Déjà, on a parlé de séparation, le spectre du divorce est entré dans la maison, il ne la quittera plus. Il est à noter que, sauf cas très graves, comme par exemple l’abandon du foyer à cause d’un autre amour, la faute de la scission incombe aux deux époux (Jusque-là c’est fair play !). On n’a voulu faire des concessions, ni pardonner ; les deux conjoints se dressent l’un devant l’autre comme deux ennemis. C’est grand dommage (Donc c’est la faute des deux et logiquement chacun devrait se remettre en question).

Il faut que la femme soit consciente des difficultés qui vont surgir pour elle (Alors là on passe un peu en mode menace. Et je ne sais pas si vous avez remarqué mais c’est un homme qui parle car c’est écrit « la femme » alors que comme on le voit dans d’autres passage, si c’était une femme elle aurait dit « il faut que nous soyons conscientes ». Donc je suppose que ce qui va suivre est écrit par un homme #fernand). Il est indispensable qu’elle abandonne tout ressentiment et qu’elle recherche en elle-même des excuses à son mari. Est-elle certaine d’avoir toujours agi dans le bon sens et n’a-t-elle rien à se reprocher ? » (BOUM ! Là on frôle le pervers narcissique manipulateur qui joue sur la culpabilité d’une personne qu’on a conditionné à se remettre en question. Mais ce n’est pas fini).

« Le mari peut être incapable ou trop insouciant, aimer le jeu, la boisson, être léger. Tous ces graves défauts peuvent être corrigés si l’épouse a le courage de les supporter et cherche le moyen d’y remédier. Elle le trouvera si elle a encore assez d’amour pour tenter l’épreuve. Beaucoup de patience et d’abnégation sont nécessaires. Nous avons souvent vu des femmes triompher. Qu’elles considèrent alors le mari comme un malade qu’il faut soigner et guérir et qu’elles soient bien persuadées qu’elles trouveront en elles le remède et l’énergie pour résister. Il faudra de longs mois, voire même des années. On croira avoir gagné la parie et ce sera souvent à recommencer. Mais qu’importe ! Tout vaut mieux que la séparation, surtout lorsqu’il existe des enfants. » (Page 225).

Voilà qui est très explicite. Personnellement, peu importe votre genre, je ne vous conseille pas de vous lancer dans une relation avec l’objectif de changer l’autre. Imaginez que cette personne sera toujours la même dans 10 ou 20 ans et demandez-vous si vous pourriez vivre avec et faire des enfants si c’est votre projet. Si ce n’est pas le cas, ce n’est peut-être pas la peine de vous infliger ça !

LE PIRE DU PIRE N°2

On en revient à l’extrait de l’intro mais maintenant je vous lis la suite !

« La vie conjugale. C’est là que commence l’existence de la femme. Le bonheur dans le ménage constitue l’unique but vers lequel seront dirigés tous ses efforts. Comment réaliser la joie de vivre ? Tout simplement en cherchant toujours en soi-même toutes les possibilités d’entente. Toutes les concessions devront être faites par la jeune femme, qui devra s’interdire amour-propre, orgueil, dignité offensée, susceptibilité et rancune. Elle évitera les discussions, les querelles et devra toujours rechercher non pas qui a tort ou qui a raison, mais ce qui est juste.

Que notre jeune femme fasse tous les matins silence et réfléchisse à ce qu’elle doit faire au cours de la journée. Qu’elle soit bienveillante, indulgente et consciente de toutes les qualités de son mari et qu’elle soit bien persuadée qu’elle a elle-même des défauts que celui-ci a remarqués. Le sort de son ménage dépendra entièrement de l’attitude qu’elle prendra. » (Page 224).

LE PIRE DU PIRE N°1

« Le jardin secret de la femme. Les ablutions, les bains, l’hygiène devront rester étrangers au mari. Notre jeune femme aura le plus grand intérêt à prendre ces soins lorsque le mari aura quitté la maison pour aller à son travail ou le soir avant de se mettre au lit. Il est inutile que l’époux soit présent ? La pudeur est recommandée. La femme mariée ne doit jamais se laisser aller vis-à-vis de son mari, qui doit tout ignorer de l’attention qu’elle prête à son corps, à sa santé, à son hygiène. Qu’elle se maquille en dehors de lui, et surtout qu’elle ne répète pas sans cesse qu’elle se trouve laide, trop grosse ou qu’elle vieillit. L’homme ne prête attention à cela que lorsque la femme insiste sur les inconvénients qu’elle peut ressentir d’un état qui lui paraît désagréable.

La jeune femme parlera le moins possible de ses malaises, de ses maladies ou des soucis occasionnés par son état physique. Tout cela reste son domaine propre et ne concerne pas le mari. L’homme, dont la nature est différente de celle de la femme, ne comprend pas les fatigues qu’elle éprouve et les malaises qu’elle peut ressentir. Ce qui ne l’empêchera pas d’être fort inquiet au moment d’une maladie ou d’une grossesse. La compassion de l’époux pour toutes les petites misères physiques est donc superficielle. Elle est inutile et ne sert qu’à l’agacer et à le rendre maussade. Mieux veut se faire et garder secrets les maux dont nous souffrons toutes.

L’amour est une grande aventure au cours de laquelle rien de doit être laissé au hasard. La femme, plus que l’homme, doit être consciente qu’en cette affaire, rien n’est jamais acquis et que tout est constamment à gagner » (Page 224).

CONCLUSION

Pour résumer, on a appris aux femmes dès leur plus jeune âge à rechercher la perfection, à soigner leurs apparences et à mettre leurs intérêts de côté pour se dévouer aux autres. Tout ça en souriant, en silence et en cachant la moindre difficulté.

Même si ces ancrages se sont atténués avec le temps, ils ont quand même bien traversé les générations. Maintenant que les femmes travaillent, elles se retrouvent parfois à cumuler les tâches de la « maitresse de maison », leurs enfants et leurs carrières. Cette image de working girl parfaite qui doit tout gérer et être heureuse, est culpabilisante pour toutes celles qui cherchent à atteindre cet idéal irréaliste. Les hommes sont de plus en plus impliqués dans les tâches ménagères et l’éducation des enfants mais d’après les récentes études, ça reste encore très inégalitaire.

Certaines femmes m’ont témoigné que ces ancrages sont devenus leur zone de confort. Elles ont été habituées à vivre selon des règles dictées par leurs éducation et la société. Tant qu’elles restaient sur ces rails la vie était facile puisqu’elles n’avaient pas le choix. Mais devenir consciente et sortir de ces schémas devient une véritable lutte intérieure et sociale : une crise d’identité.

Hormis les idées sexistes du siècle dernier, les ancrages de l’éducation traditionnelle ne sont pas mauvais pour autant. Le plus important c’est de les identifier pour éviter de répéter automatiquement des comportements qui ne nous correspondent peut-être pas.

Tant qu’on reste conscient et qu’on est en accord avec nos comportements, tout va bien. Mais si vous ressentez une dissonance, une lutte intérieure, entre un comportement lié à un conditionnement ou une pression sociale et ce dont vous avez vraiment envie, vous devez vous écouter même si ça vous demande beaucoup d’efforts.

Finalement, peu importe votre façon de vivre, le plus important c’est de ne pas vous laissez influencer par l’extérieur, mais d’être en accord avec vous-même.


Publié par Romain

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